Brandon Gotto : « Je ne dis pas que mes films sont parfaits, mais je pense qu’ils méritent au moins d’être vus ! »

Brandon Gotto , réalisateur belge, a accepté de nous parler de son nouveau film Iris.

Si vous deviez vous présenter en quelques lignes, que diriez-vous ?

Je m’appelle Brandon Gotto, j’ai 30 ans et je suis un cinéaste belge indépendant.

Quel fut votre parcours ?

Un parcours autodidacte avec beaucoup d’erreurs qui m’ont appris beaucoup. Je suis mordu de cinéma depuis tout petit. Avec du recul, je me rends compte que c’était une évidence que je finisse par faire des films.

Les choses ont commencé à devenir concrètes en 2022, lors de la sortie de mon premier long-métrage intitulé Gravidam.

Pandæmonium a été désigné meilleur film d’horreur à Athènes, Pouvez-vous nous en parler ?

Alors oui, en effet, c’est l’un des quelques prix qu’il a remportés dans divers festivals à travers le monde. C’est une mention qui fait plaisir, bien évidemment, mais ce qui est super avec ce film, c’est qu’il a explosé sur YouTube et les plateformes de streaming. Avec du recul, je trouve ce précédent film un peu paresseux et très convenu. J’avais des dogmes en tête lors de sa réalisation, mais en tout cas, il nous a permis de rentabiliser un peu sa production.

Vous venez de sortir un nouveau film, comment est né Iris ?

L’idée d’Iris est née il y a 10 ans. Très vite, j’en ai fait un court-métrage de 30 minutes. J’avais 20 ans et peu d’expérience, mais je me rappelle m’être dit que je m’étais trouvé en tant que jeune réalisateur.

J’ai tout de suite su qu’être au plus proche de l’humain dans mes fictions, c’était ça qui me faisait vibrer. Je m’étais donc juré qu’un jour, j’en ferais un long-métrage, avec plus de moyens et de maturité.
En 2021, j’ai écrit le scénario. J’allais le réaliser, mais Gravidam s’est finalement imposé, alors j’ai laissé mûrir le projet encore un peu. Au printemps 2024, j’ai ressorti ce scénario, persuadé qu’il serait catastrophique… et en réalité, pas du tout. Je l’ai trouvé très incarné, précis et surtout personnel. Je me suis donc jeté à corps perdu dans la réalisation de ce nouveau film, qui représentait une rupture totale avec mes précédents, des thrillers horrifiques. Tout cela m’a beaucoup excité.
C’est le portrait brûlant d’une jeune femme en quête d’amour et d’acceptation. Un drame social haut en couleurs, qui traite de l’horreur de la réalité et d’un mal existentiel qui se dessine peu à peu chez les jeunes d’aujourd’hui.

Iris vous a-t-il coûté cher ?

Honnêtement, à part le carburant pour les trajets du tournage et la nourriture, rien. Je vous jure que ce n’est pas une blague. Les retours financiers de Pandæmonium sont arrivés bien après le tournage d’Iris, donc on a dû se débrouiller. Mais finalement, tant mieux. C’est bien la preuve qu’on voulait vraiment faire ce film. Ramené plus bas que terre, j’ai essayé d’être le plus efficace et créatif possible. Je trouve qu’on ressent cette folle passion en regardant le film : l’urgence de vouloir le réaliser à tout prix.

Obtenez-vous facilement des aides budgétaires ?

Je reconnais que j’ai un sérieux souci d’impatience concernant tout ça. Je n’ai encore jamais fait de démarches. J’entends beaucoup de personnes dire que ça prend du temps, beaucoup de temps. Moi, je suis très impatient, c’est maladif. Les jours passent et il est impossible de les récupérer.

Donc, généralement, je brûle sur place et me débrouille pour lancer mes projets tel un fou déchaîné. Ma chance, c’est que mon truc, ce sont les petits films intimistes et minimalistes, donc c’est réalisable avec peu de moyens. Mais bien entendu, j’aimerais beaucoup, un jour, avoir plus de ressources, notamment pour mon prochain projet, qui risque d’être un très gros morceau. Si quelqu’un a 10 000 € à dépenser, je suis preneur (rires).

Vous êtes sorti pour la première fois de la Belgique pour tourner Iris. Comment était-ce ?

J’ai beaucoup aimé, mais la Belgique m’a énormément manqué. Niveau ambiance et décors, ça n’a rien à voir. L’aspect rustre et abîmé de la Belgique colle parfaitement à mon univers. Et puis nos Ardennes ! Charleroi, Bruxelles, la côte ! C’est tellement cinématographique chez nous. Je tournerai encore en France si cela facilite la production de certains projets, mais plus je peux rester ici, mieux c’est.

Les festivals s’intéressent-ils à Iris ?

Le néant. Des refus, pas de réponses. J’ai l’habitude. Je ne dis pas que mes films sont parfaits, mais je pense qu’ils méritent au moins d’être vus dans ce genre de conditions. Mais bon, c’est comme ça, tant pis. Je ne me lamente pas, j’avance.

Aurions-nous la chance de voir Iris à la télévision ?

Dans le circuit classique de la télévision, je ne sais pas. Ce serait cool, car le film a une véritable vocation sociale. En tout cas, pour le moment, il est disponible sur Amazon Prime Vidéo. Donc, si vous avez l’abonnement et l’application sur votre TV, c’est tout bon !

Quels acteurs ou quels actrices français(es) rêvez-vous avoir dans un de vos films ?

Par pur fantasme, je crois que j’aimerais tourner un film avec Vincent Lindon, Audrey Dana, Raphaël Quenard, Astrid Whettnall, Anaël Snoek et Laurent Lucas. Après bon… voilà. C’est une idée irréalisable pour le moment. Et puis, je suis fidèle à mes camarades.

Votre compagne ne joue-t-elle pas dans Iris?

C’est bien elle, en effet. Margaux Colarusso est ma compagne et ma principale collaboratrice.

Mais elle ne bénéficie d’aucune facilité. Elle est toujours poussée au maximum. L’avantage, c’est qu’elle ne demande que ça, elle veut en découdre, c’est pour ça qu’on enchaîne les collaborations. Ce n’est pas près de s’arrêter.

Ne reprenez-vous pas parfois des acteurs qui ont déjà tourné avec vous ?

Tout à fait. J’aime cette idée de troupe, donc j’essaie de tourner avec les mêmes personnes quand les moyens et les agendas le permettent. Ce n’est pas par facilité, j’aime vraiment ces actrices et acteurs ; pour certains, on n’a même plus besoin de tergiverser autour de certaines choses, on se comprend en un regard. C’est une grande joie de travailler comme ça et très amusant, donc je ne m’en prive pas. Mais j’essaie de leur offrir quelque chose de très différent à chaque fois.

Et n’êtes-vous pas un homme à multiples casquettes ?

Pour l’instant, c’est vrai, oui. Je suis ouvert à la collaboration avec des techniciens, bien entendu, mais pour la caméra et le montage, ça, je garde. Ça serait un crève-cœur de délégué. Ce serait comme refiler son gosse à quelqu’un qu’on ne connaît pas. Quelle horreur. Et pour certaines choses, c’est aussi un gain de temps, donc ça nous permet de faire les choses efficacement. J’ai aussi pu remarquer que les actrices/acteurs étaient bien plus à l’aise aussi, bizarrement. Il y a une proximité entre eux et moi qui nourrit leur jeu directement.

Pour conclure, avez-vous déjà une suite après Iris ?

Je l’espère, bientôt oui. Le scénario est prêt, le casting à moitié bouclé. Mais pour l’instant, on attend. On attend justement de voir comment ça peut se passer avec ou sans financements officiels. Ce sera inspiré d’une affaire glaçante qui a eu lieu entre les années 80 et le début des années 2000 en France et en Belgique. Un film très noir. Quand il va débouler, ça va faire très mal.

Propos recueillis par Stéphanie

Photos : Deep dreams films